Après plus de douze heures de voyage, j’arrive enfin à ma destination : la Colombie.
Férue de littérature et curieuse de rencontrer d’autres cultures, j’ai décidé de visiter ce pays au cours d’un long voyage.
Mon intérêt pour la Colombie a augmenté au fil de mes lectures, et je m’en faisais une idée qui allait à l’encontre de l’image violente souvent décrite à la télévision.
J’ai alors pris la décision d’aller voir moi-même ce qu’il en est. Entre magie et réel, je suis certaine de découvrir nombre de richesses culturelles. Pour cela, je vais me laisser guider par les festivités locales, qui me permettront de visiter les différentes régions du pays.
C’est ainsi que je me trouve à Barranquilla : à la veille de l’ouverture du carnaval !
Barranquilla ou la Porte d'Or de la Colombie
La ville de Barranquilla est la capitale du département de l’Atlántico, au nord du pays. Elle est située en bordure du fleuve Magdalena et à quelques kilomètres de l’embouchure de la mer des Caraïbes. Contrairement à ce que l’on pourrait tout d’abord penser, il ne s’agit pas d’une ville fondée au début de l’époque coloniale mais plus tard, en 1626. C’est en 1813 seulement qu’elle a été déclarée comme ville par le gouverneur du nouvel État libre de Carthagène des Indes.
Barranquilla était en premier lieu un port fluvial qui a pris de l’importance grâce au commerce des bateaux à vapeur. Mais sa localisation privilégiée lui permet également de développer l’un des principaux ports maritimes de Colombie. C’est ainsi qu’en 1936, la ville reçoit le surnom de Porte d’or de Colombie.
Source : Paseo Bolivar, Barranquilla, Colombie, 1939, Archivo Historico del Atlantico, barranquillabicentenario
J’ai hâte de visiter la ville, qui a un aspect cosmopolite. En effet, en tant que port maritime, elle a été la destination de plusieurs vagues migratoires, nous offrant aujourd’hui un patrimoine architectural hétéroclite réparti principalement sur deux centres historiques.
Le musée de la Caraïbe est l’un des monuments qui attire particulièrement mon attention. Situé au sein du Parc Culturel de la Caraïbe, il a été officiellement inauguré en 2009. Il s’agit d’un projet novateur qui, outre une fonction didactique traditionnelle, fait appel aux sens du visiteur pour l’immerger dans le patrimoine culturel de la région et ses histoires. L’un de ses objectifs est de rendre leur visibilité aux différents peuples et cultures ayant coexisté et coexistant dans la région. Une salle du pavillon est également consacrée à l’écrivain Gabriel García Márquez.
En effet, García Márquez, bien qu’originaire de Magdalena, département voisin, a passé de nombreuses années à Barranquilla. Figure emblématique du réalisme magique, mondialement reconnu et lu suite au décernement du prix Nobel de littérature en 1982 pour son œuvre Cent ans de solitude, il prend place au sein du groupe d’intellectuels connu sous le nom de Groupe de Barranquilla, du milieu du XXe siècle. J’espère bien retrouver les traces de ces écrivains, artistes, cinéastes et journalistes à travers le dédale des rues de la ville, à la croisée des chemins entre magie et réel.
Aux alentours de Barranquilla, il me semble indispensable de visiter Bocas de Ceniza, point d’embouchure du fleuve Magdalena sur la mer Caraïbe, ainsi que la commune de Puerto Colombia, dont la jetée fut l’une des plus longues du monde, au moment de sa construction, en 1893. Au reste, une promenade à travers la mangrove me donnera certainement un aperçu de la biodiversité de la région.
Mais aujourd’hui, c’est le carnaval qui m’intéresse.
Source : Carnaval, Barranquilla, 2016, Waar was Frank?
Le Carnaval : une représentation culturelle Caribéenne
Il semblerait que les premiers témoignages du carnaval de Barranquilla datent du XIXe siècle. Cette tradition, qui a su perdurer dans le temps, a été déclarée chef-d’œuvre du patrimoine oral et immatériel de l’Humanité par l’Unesco, en 2003.
Il s’agit de l’événement le plus important de Colombie, attirant presque un million de personnes chaque année, entre habitants de la ville et ses environs, et touristes, aussi bien colombiens qu’étrangers. Le carnaval débute le samedi précédant le mercredi des Cendres et prend fin le mardi. Cependant, plusieurs événements ont lieu tout au long du mois de février, au cours du pré-carnaval, comme la lecture du « décret du carnaval », l’élection des rois du carnaval des enfants, l’élection de la reine du carnaval – qui défilera l’année suivante, lors de la « bataille des fleurs », cérémonie d’ouverture du carnaval – ainsi que le défilé nocturne de la Guacherna.
Source : Carnaval de Barranquilla, 2012, Juanerre
Le roi Momo, personnage satirique tiré de la mythologie grecque, défile lui aussi, le samedi de carnaval, dans une autre partie de la ville. Les deux jours qui suivent laissent place aux danses et musiques en tous genres, allant des plus traditionnelles à d’autres, bien plus internationales. Finalement, le mardi, au milieu des pleurs et des lamentations, Joselito, mort de tant festoyer, est accompagné jusqu’à sa dernière demeure. Il ressuscitera pourtant l’année suivante, afin de se joindre à nouveau au carnaval.
Source : Carnaval de Baranquilla, 2012, Michele Mariani
Accompagnant le roi Momo et la reine du carnaval, les rues s’emplissent de figures emblématiques. Les groupes de singes, représentatifs de la faune régionale, font partie des personnages les plus anciens que l’on retrouve au carnaval chaque année. Exhibant une partie de la diversité culturelle et ethnique, et non sans humour, des hommes reprennent la figure traditionnelle des vendeuses ambulantes des fameux bollos, plats de viande, fromage et manioc, enrobés dans une pâte de maïs puis enveloppés dans des feuilles. Les Indiens Caraïbes, habitant la région bien avant l’arrivée des Européens, sont eux aussi représentés.
Source : Carnaval de Baranquilla, 2012, Michele Mariani
Source : Carnaval de Barranquilla, 2014, Carnaval.com Studios
Certains costumes peuvent également correspondre à une danse particulière. C’est le cas des « Marimondas », créés à l’origine dans le but de se moquer de la classe bourgeoise, et qui dansent au rythme du fandango, typique de la région et proche du porro, dansé par les groupes des « Piloneras », représentation des femmes pilant le maïs. D’autres danses populaires figurent au carnaval de Barranquilla, comme le mapalé, rythme effréné d’origine africaine, la cumbia colombienne et le vallenato, toutes deux traditionelles de la région. Les costumes de celles-ci consistent en un chapeau voltiao pour les hommes et en de larges jupes pour les femmes, qui les feront virevolter autour d’elles. Parmi les danses représentatives du patrimoine culturel de Barranquilla, se trouve celle dite du Congo, dont les costumes en strass sont hauts en couleurs, ainsi que celle du faroto, originaire des populations indigènes vivant sur les berges du fleuve Magdalena.
Source : Carnaval de Barranquilla, 2014, Carnaval.com Studios
Me voilà fin prête pour profiter de quatre jours aux rythmes endiablés. Je ne pouvais espérer mieux pour ce début de voyage. Cela ne fait aucun doute, la magie est bien là, présente aux quatre coins de Barranquilla. J’attendrai donc la semaine prochaine, quand le calme sera revenu, pour visiter ville.